petites morts sans importance
&
poésie de supermarché

 

 

au commencement

 

 

Les choses de la vie sont si fragiles qu’on en oublie parfois cette évidence, déguisée du futile pour se convaincre de la rassurante illusion que soixante années valent mieux que soixante secondes puisque l’existence doit se compter en durée. Et je me surprends moi-même de ma mine affligée à la lecture de l’âge de ces enfants gravé sur la dalle. Dubitative aussi, comme si l’éphémère s’opposait à la légitimité. Ainsi donc soyons prétentieux de croire que le temps nous érode à l’instar des roches et des océans, nous polit à nous rendre meilleurs et, pourquoi pas, immortels lorsque nous ne serions qu’un rêve. Mais qui se souviendra de mes dessins sur la neige ou de l’inscription de mon nom sur une tombe ? Je n’ai rien appris de la conscience, ni rien de l'humilité.
Une mouche tente, en vain, de m’agacer, gâchant inutilement les restes de sa vie qui sont tout autant les restes de la mienne, à une échelle toute proche. Je reste là, assis sur ma pierre, savourant une minute d'éternité, impassible et sans rien bouger. L’immobilisme d’un caillou lancé à quelques dizaines de kilomètres par seconde dans le vide. Quand le temps et la distance.